Lignes de crêtes, collectif

Promenades littéraires en montagne

De Florence Gaillard, Daniele Maggetti, Stéphane Pétermann

Lausanne, Editions Noir sur Blanc, 2021, 295 p.

Voici un livre de patrimoine qui réjouira marcheurs, lecteurs et amoureux des livres – car dans ce volume tout est beau : le titre, les itinéraires, les textes d’écrivains, les subtiles photographies d’Olga Calfiero : images en noir et blanc ou en couleur, utilisation de filtres, gros-plans d’écorces ou de rochers… Les auteurs ont choisi vingt randonnées en montagne, dont une dizaine en Valais mais leur projet ne ressemble en rien à celui des guides touristiques traditionnels : certes l’itinéraire est tracé sur une carte qui indique la longueur du tracé mais les textes (et les images) qui l’accompagnent ouvrent la perspective au lieu de « guider » la vue ou de baliser la marche. Certaines de ces marches nous amènent vers des hauts lieux de la randonnée, comme le Creux-du-Van, Derborence ou le bois de Finges ; d’autres s’attardent sur des lieux plus improbables : plutôt que de s’attarder sur la cascade de la Pissevache, Noëlle Revaz décrit, dans un texte inédit, son village, Vernayaz, depuis le train : dans un moment poignant, elle capte le visage de son père alors que des touristes regardent avec distraction ou avec un brin de mépris ce lieu « où il faut être né pour vivre »…. La réussite de l’ouvrage tient à ce qu’autour d’un lieu se projettent plusieurs points de vue : ainsi le cadre alpin de Loèche-les-Bains « enchante » Guy de Maupassant, le mélange des langues en fait pour Gisèle Ansorge un « Babel aquatique ». L’écrivain James Baldwin quant à lui souffre en 1953 du racisme naïf des enfants pour qui « aucun Noir n’avait jamais mis les pieds dans ce minuscule village »…

On découvre, dans ce pays grand comme un timbre sur la carte du monde, non seulement la grande variété des auteurs (écrivains, mais aussi villageois, médecins, naturalistes ou voyageurs), celle des textes (toute la gamme est là : de la lettre au roman policier en passant par les descriptions de pionniers de la littérature alpestre) mais aussi celle des paysages et de la morphologie : deux géographes (Jonathan Bussard et Emmanuel Reynard) rédigent des encarts de géomorphologie dans une langue claire et précise, sur les « plis » du Jura, « le Rhône sauvage » ou « les minéraux du Binntal ». Nous aimons ces livres, ceux que Jean Giono appelle «Les vraies richesses».

Recension par Pierre-François Mettan

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