Une fille hors pères, Sarah Baud

Slatkine 2020

L’enlèvement d’une enfant au Mexique, la découverte d’une fillette en état de choc et non identifiée, sur le territoire français, puis dix-neuf ans plus tard, dans le district de Lémania, une jeune femme entraînée dans une succession d’événements violents. Voilà bien un début de récit qui ne manque pas de piquant ! Qui sont donc ces personnages féminins et quel lien y a-t-il entre eux ?

Dès les premières pages, l’auteure, Sarah Baud, nous emmène dans une histoire étourdissante et   truffée de rebondissements inattendus, dans un tourbillon incessant de péripéties qui se déroulent à un train d’enfer. Elle y intègre habilement un passé et un présent qui malmènent l’héroïne de ce récit époustouflant. Chaque épisode de sa vie nous prend aux tripes et nous tient en haleine jusqu’au bout. Argent, pouvoir, trafics en tous genres et meurtres, voilà bien les ingrédients de ce roman à suspense.
Une panoplie de personnages principaux tournent autour de notre héroïne, atypique et attachante. Les uns sont cupides, abjects et dangereux, les autres tentent de survivre dans un environnement empreint de peur, de mensonge et de trahison. L’amour en sauvera-t-il quelques-uns ?

Sarah Baud privilégie une écriture percutante sans jamais tomber dans un étalage excessif de la violence, les mots choisis pour décrire l’horreur étant suffisamment parlant. Elle sait emporter le lecteur dans tous ses états émotionnels jusqu’au dénouement.
Un roman à ne pas manquer pour qui aime les sensations fortes !

Recension Marylène Rittiner

Extrait pages 247-248

C’était son cauchemar. Rien qu’à elle.

Un cauchemar récurrent qui foulait le sol de ses nuits depuis son enfance.

Depuis l’éclosion de sa conscience.

Un cauchemar qui se nourrissait de ses émotions massivement refoulées.

Anxiété. Effroi. Détresse.

Des émotions nées d’un vol.

On la volait. Oui. On la volait.

On l’emportait à la manière d’un jouet qui change de propriétaire. Un jouet que l’on se prête et qui n’appartient plus à personne. Cette douloureuse sensation devenait une fragilité excessive qui la privait de sa capacité à rester saine d’esprit. A son paroxysme, le cauchemar la dépouillait de toute volonté de vivre. Délestée, elle s’envolait comme une plume dans un ciel sans frontière. Sans amour. Sans tendresse. Jusqu’à n’être plus qu’une virgule qui dérive à l’horizon.

Et aujourd’hui, telle une échéance qui venait buter contre l’écran noir de ses paupières, le même cauchemar revenait en force. Mais quelque chose, dans la trame de son rêve, avait changé.

Une émotion violente, profonde, semblable à une réconciliation, lui montrait la direction à suivre dans cet univers unilatéralement blanc. Une émotion qui semait des points de repère le long de son errance et qui prenait la forme de bruits sourds. Pareils à des battements de cœur. Quelqu’un lui parlait. La berçait.

Instinctivement, elle se colla à lui. Par désespoir. Par nécessité. Pour survivre.
Alors des bras de géant se refermèrent sur son corps jusqu’à l’écraser. Dans cette vaste prison de chair, elle comprit enfin que rien ne servait de lutter. Qu’il suffisait de se laisser aller. De lâcher prise. La vie saurait trouver une solution. Une sortie de secours.

Dans un ultime sursaut, elle accepta son destin et se laissa emporter par l’énergie du géant.

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