Sa Vie en Conte, Patricia Rosselló
Naissance d’une passion
C’est en 1994, à l’âge de 29 ans que je m’intéresse véritablement aux contes… Ceux que j’ai entre les mains à ce moment-là sont des contes de sagesse issus de différents pays : Moyen-Orient, Asie et Afrique en particulier. Désormais, où que je sois, qu’il s’agisse de mon histoire ou de celle d’une autre personne, un conte me revient en mémoire, ou alors, se pourrait-il qu’il s’agisse du contraire ?
Lorsque je m’essaye à raconter les contes qui me plaisent, le résultat est désolant; les mots qui sortent de ma bouche sont tout différents de ceux qui voguent dans mon esprit, clairs et précis. Je me contente donc d’aller écouter les conteurs qui font danser moult personnages, donnant vie à de nombreux mondes dont j’ignore tout, sur les planches qu’ils occupent de ça et là.
En décembre 1997, je découvre le Burkina Fasso qui délivre ma voix. Je participe à un stage de contes à Bobo Dioulasso et aide à la préparation de la première édition du Festival de contes et de musique « Djeliya » qui a lieu au milieu d’une cour dont une famille de griots vient d’hériter du grand-père. Mes deux enfants, alors âgés de 7 et 9 ans, assis au milieu de quelques centaines d’africains, d’une poignée d’européens, passent le Nouvel-An en m’écoutant raconter un conte d’une quarantaine de minutes. Le conte se termine à 00h10. De minuit, de la nouvelle année, il n’est pas fait cas, le festival continue naturellement jusqu’au petit matin.
D’autres scènes, d’autres expériences m’accompagnent pendant quelques années où j’apprends à mettre ces contes en bouche devant différents types de publics. En 2002-2003, une formation de « thérapeute conteuse » auprès de l’Association La Voie-des-Contes à Paris que je n’achèverai pas, la trouvant trop soporifique à côté du monde oral et vivant que je connais, me donne, entre autres, l’occasion d’expérimenter et de valider un cursus parallèle; je découvre un atelier d’écriture de contes et de développement personnel qui me permet de renouer avec ma propre écriture d’abord, puis, que je m’empresse de recréer à Genève pour le proposer à de petits groupes à la fin de l’année 2003. J’intègre à travers cette expérience une donnée fondamentale dans mon cheminement : la structure vitale du conte merveilleux. Un livre qui réuni quatre co-auteurs paru aux Editions In Octavo, Paris intitulé « Etranges Parcours, vol. III », me permet de publier une nouvelle « Au Fil de Soi ». Nous sommes en 2005.
Mais, parlons du conte
Cheminer le long de l’échine dorsale de cette drôle de bête n’est point sans risque. Il s’agit de monter aux barreaux de l’échelle sans faux pas. Cependant, rester agrippé à la structure du conte de peur de se perdre n’apporte rien aux oreilles bienveillantes qui sont venues l’entendre, ni aux yeux curieux résolus à le lire. Il faut s’en aller paître dans d’autres pâturages avant de poser le pied sur l’échelon suivant. Ainsi, vous emmenez vos ouailles en voyage ou dans de terrifiantes quêtes. Ce n’est qu’une fois avoir atteint le dernier barreau de l’échelle que le conte prend tout son sens. Et c’est là où la magie commence, car le conte continue son chemin en vous, malgré vous et sans vous.
Hassane Kouyaté dit du conte qu’il est guérisseur car il est utile, subtil et futile. Henri Gougaud dit que le conte n’est pas fait pour endormir les enfants, mais bien pour éveiller les Hommes. Pour lui, le conte est vivant.
Et comment fait-on pour introduire la magie dans un conte ?
D’abord en se laissant porter, en se laissant inspirer. Par quoi ? Une idée. Une qui nous touche, qui nous parle. L’idée féconde le conteur et l’auteur pour ensuite gagner cet aspect universel qui n’appartient qu’aux contes. Le même conte parle à tous. Et comment fait-on un saut quantique ? En changeant de dimension.
Le conte a cette faculté de nous emmener dans d’autres mondes, celui de l’imagination en particulier où tout devient possible. Absolument tout. Placer dans cette nébuleuse un pauvre héros démuni et vous voilà hissé sur le premier échelon. Que faire d’un tel malheur ? Surtout rien. Laissez votre inconscient faire. « Ce n’est tout de même pas pour me rappeler cette fichue situation dans laquelle je suis coincée depuis plus de six mois», allez-vous me dire. Et bien si. Sans le savoir, vous venez de grimper sur le deuxième échelon. « Mais c’est terrible, je ne sais pas comment m’en sortir, j’ai tout essayé, tout pensé… »
C’est au fond de votre plus grand désespoir que va intervenir la magie. Ce fameux renard est bien venu vous trouver alors que vous étiez seul abandonné dans ce cabanon au milieu des bois à la merci du premier animal venu. Qui plus est, il s’agissait d’un renard qui parle ! Vous devez bien l’admettre, votre petite voix intérieure est venue vous tirer d’affaires. Voyez-vous ? C’est ainsi que les contes s’immiscent dans votre quotidien.
D’échelon en échelon, le héros va pouvoir s’engager sur de nouvelles pistes, retrouver des ressources insoupçonnées qui raviveront à leurs tours ses craintes les plus profondes, ses manques les plus cruciaux, ses croyances les plus ancrées, face auxquels il choisit d’avoir un autre regard, grâce à la compréhension toute neuve qu’il a des circonstances; et peut-être bien que la situation ne se retournera qu’au bout de la 2ème, 3ème ou 10ème tentative pour aboutir à une finalité à laquelle il n’avait jamais osé penser. Une finalité qui lui permettra d’endosser en toute conscience un rôle fait pour lui. Vous venez de poser le pied sur le dernier échelon.
Au-delà du rêve, le conte est un cheminement, un puissant outil de transformation.
Je garde cette dimension à l’esprit lorsque j’utilise des contes dans mon cabinet de thérapies ou lorsque j’emmène un public dans une activité ludique d’écriture de contes. Il se passe toujours quelque chose qui nous dépasse.
Plus d’informations sur les ateliers du rêve
Patricia Rosselló, Sa-vie-en-conte.com(Genève)
e-mail: eveil@sa-vie-en-conte.com
Animatrice d’ateliers de contes
Kinésiologue et hypnothérapeute
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